Élu : Un alter ego ?

Depuis 1993, jamais aucune étude ne s’était penchée sur le profil des représentants du personnel. Le département d’études et de […]

Le portrait statistique des quelque 600 000 élus ou délégués syndicaux en poste en 2017 vient d’être publié.

Depuis 1993, jamais aucune étude ne s’était penchée sur le profil des représentants du personnel. Le département d’études et de statistiques du ministère du Travail (Dares) vient de combler ce vide en publiant les résultats d’une enquête menée tout au long du premier semestre 2017  1. Premier enseignement : le décalage certain entre la démographie des élus et celle des salariés. Alors que, toutes catégories confondues, les hommes représentent 58 % des personnes travaillant dans le privé, 67 % des membres de Chsct et 60 % des élus sont de sexe masculin. « En dépit de la diffusion de politiques volontaristes promouvant la parité au sein des organisations syndicales, note Maria-Teresa Pignoni, autrice d’une note à ce sujet, les inégalités d’accès aux responsabilités persistent. » Et l’examen de l’âge et de l’ancienneté des élus, comparés à ceux des salariés, n’y change rien.

Pour preuve, tandis que la moitié seulement de la population active dans le privé a entre 40 et 59  ans, 65 % des représentants du personnel s’inscrivent dans cette classe d’âge. Plus symptomatique encore, on compte parmi eux trois fois moins de trentenaires que parmi l’ensemble des effectifs. Est-ce cet écart qui explique qu’un nombre substantiel de salariés méconnaissent l’existence de leurs élus ? Quoi qu’il en soit, si l’on se fie aux témoignages livrés aux enquêteurs de la Dares par les directions d’entreprise, les salariés repèrent mal leurs représentants. Un tiers de ceux qui disent ne pas bénéficier de leur présence se méprennent : 7 % disposeraient à leur côté d’au moins une instance élue.

Au-delà, quels rapports les personnels titulaires de délégation développent-ils avec les syndicats ? Celui-ci est-il bien différent de celui que peuvent entretenir leurs collègues avec ces mêmes organisations ? Si, incontestablement, les élus et mandatés affichent une relation plus étroite avec elles que les autres salariés –  56 % en sont adhérents contre 12 % de ces derniers  –, là s’arrête la différence.

Seule une minorité d’élus dit s’être engagée par « conviction » (14,6 %), ou suite à « la participation à une grève, à une manifestation ou à un conflit collectif » (9,7 %). Ils sont plus nombreux à évoquer « un problème au travail » (22 %) et, plus encore, un « contexte », « une proximité du syndicat », « des affinités existant avec des collègues déjà syndiqués ». Pour les élus comme pour les autres salariés, les facteurs relationnels apparaissent donc comme l’élément central de l’engagement (50,8 % pour les premiers, 51,2 % pour les seconds).

Beaucoup d’autres informations sont fournies par cette enquête sur l’ancienneté des représentants du personnel, le cumul des mandats et le sentiment contrasté que ceux-ci peuvent avoir de leur fonction : celui de « bien traduire les aspirations des salariés » et d’apprécier la tâche qui leur revient de les « défendre » et de leur « rendre service » mais aussi de ne pas peser comme ils le devraient sur les décisions prises par les directions. Un paragraphe cependant leur rend justice. Se concentrant sur les conséquences de l’existence de représentants du personnel en entreprise, il affirme que, réalisée « toutes choses égales par ailleurs, […] une analyse approfondie du sujet fait la preuve que les salariés bénéficiant de leur présence ont plus de chances que les autres de participer aux décisions concernant la politique salariale ou l’organisation du travail – respectivement 1,5 fois plus de probabilités ».

Cadres

La probabilité pour les cadres d’être représentants du personnel est inférieure à celle des autres catégories. Si, par ailleurs, ils sont moins syndiqués, lorsqu’ils s’engagent, ils cumulent plus souvent le mandat de délégué syndical et d’élu. « Une offre syndicale plus large peut expliquer en partie ce constat », commente la Dares en précisant que, parmi les salariés syndiqués, les cadres sont aussi relativement plus nombreux à déclarer avoir adhéré à un syndicat « par choix » ou « suite à un problème ».